Préjugé contre préjugé: L'avis tranché de l'actrice anglaise Fanny Kemble sur l'esclavage aux Etats-Unis (1838)

Si les Noirs sont incapables d’apprendre, alors je ne vois pas l’utilité de ces lois qui interdisent de les instruire. A ma connaissance il n’y a pas de lois pour interdire au maître d’enseigner la lecture à son chien ou à son cheval. En fait, on n’interdit pas, l’instruction aux Noirs parce qu’ils ne peuvent pas apprendre mais justement parce qu’ils peuvent apprendre.

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Bien sûr que je pars pleine de préjugés, mais de préjugés contre l’esclavage, car je suis ce genre d’Anglaise chez qui l’absence de ce préjugé serait honteux.

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Avoir la propriété de sa personne, la capacité de vouloir et de pouvoir choisir est un don au-delà de la nourriture, du manteau et de l’abri. La bonne comparaison n’est pas là (NDL : le propriétaire lui assure que ses esclaves ont un meilleur confort matériel qu’un paysan irlandais libre mais miséreux), mais entre les esclaves et les animaux de labeur au niveau desquels vous les rabaissez.

 

 KEMBLE (Fanny), Journal of residence on a georgian plantation 1838-1839, New York, Harper & Brothers, 1863, cité et traduit par LAPEYRE (Françoise), Quand les voyageuses découvraient l’esclavage, Payot, Paris, 2009, p.99, 101. Texte original: [https://archive.org/details/journalofresiden00kembuoft]